« Le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire. » Voilà l’audace du Christianisme. Dieu s’est rendu visible aux hommes. Certains refusent une pareille affirmation de la divinité de Jésus et en font le plus grand de tous les hommes, ou ne lui accorde qu’une qualité de prophète.
La foi chrétienne confesse invariablement : Jésus est Dieu, « Rayonnement de la gloire de Dieu, expression parfaite de son être. » Dès lors, il nous faut préciser de quel Dieu nous parle donc l’Enfant de la Crèche. Comment le dit-il ? Ici, le fond et la forme du message se tiennent.
Un Tout-puissant fragile ! La raison comme le sentiment religieux des hommes attribuent à Dieu la Toute-Puissance. Or, confesser que l’Enfant de la Crèche est Dieu, c’est entrer dans un paradoxe. Le Tout-puissant endosse la fragilité du nourrisson. Ce paradoxe est proprement divin afin de corriger les pensées humaines sur la puissance et la force. Le nouveau-né est dépositaire d’une puissance de vie comme pour nous dire que la Toute-puissance de Dieu est tout entière ordonnée à la vie. Quand les hommes ont tendance à résumer la puissance à la capacité de nuisance et de destruction, l’Enfant de la Crèche nous enseigne que la puissance n’est véritable qu’au service de la vie.
Le Verbe incarné balbutie. Le Verbe éternel devra apprendre la langue des hommes. Nouveau paradoxe. Le Dieu omniscient se met à l’école d’une famille, d’une communauté humaine, de l’humanité. Dieu qui a créé le ciel et la terre par sa parole et a établi les lois universelles, vient recevoir des hommes, en l’Enfant Jésus, une langue, une culture et une sagesse particulières. Comment mieux nous dire l’importance de la parole qui nous relie les uns les autres ? Comment mieux dire la dignité de la raison humaine quand Dieu se laisse enseigner ? Comment mieux souligner que Dieu nous invite à être des êtres en dialogue les uns avec les autres ? Le Dieu que Jésus révèle est Celui qui fait de la parole et de la raison un instrument de paix.
L’infiniment Parfait devra grandir. L’Eternel rejoint le temps. Toujours ces paradoxes divins. L’Infini s’enferme dans un corps et la Perfection va devoir croître et changer. L’Enfant de la Crèche deviendra le Fils de l’Homme. Dieu nous invite à l’espérance car Lui-même s’est inscrit dans l’espérance. Un enfant est une promesse qui suppose l’engagement de ceux qui l’accueillent et l’entourent. En entrant dans l’histoire, le Fils éternel nous dit la grandeur et la chance du temps qui nous est offert. Le temps que Jésus nous partage nous propose un horizon vers lequel avancer et grandir en humanité. La crèche fonde une invincible espérance.
Confesser l’Enfant de la Crèche change notre regard sur Dieu et sur les hommes. Le Père n’a de puissance qu’au service de la vie, le Verbe nous apprend à parler et à nous écouter les uns les autres, l’Esprit-Saint féconde le temps pour en faire le lieu de nos fraternités. Puisse cette messe, où le Verbe fait chair se donne en nourriture, nous permettre d’entrer dans la joie de Noël maintenant et pour les siècles des siècles.