« De toutes les Nations, faites des disciples ! » Cette parole du Christ a une double portée que l’Église n’a eue de cesse de mettre en œuvre. Il s’agit bien sûr d’annoncer l’Evangile mais aussi de faire des hommes des disciples, des personnes en chemin et en capacité d’apprentissage toute leur vie. En raison de cette mission, l’Église a investit très tôt le champ de l’éducation. St JB de la Salle appartient à cette longue lignée d’éducateurs chrétiens qui se sont consacrés par amour de Dieu et des jeunes dans cette mission. En son temps, JB de La Sale a été novateur. Il a inventé l’école gratuite (200 ans avant Jules Ferry), ouverte aux pauvres, le regroupement des enfants par classe d’âge et un enseignement dans la langue maternelle. Ce Tricentenaire de la mort de JB de La Salle nous invite à porter un regard particulier sur l’enseignement et l’éducation.
Se consacrer à l’Enseignement. Les missions fondamentales de l’Église de prendre soin des hommes sont vite devenues des consécrations religieuses. Des chrétiens ont fondé des ordres hospitaliers pour soigner les malades, des ordres caritatifs pour prendre soin des pauvres et des ordres enseignants pour former la jeunesse. Les religieux consacrés à cette mission expriment à l’Église comme aux jeunes que la tâche d’éducation n’est pas seulement un métier mais « un sacerdoce » même si les FEC ne sont pas prêtres et que cela peut remplir la vie d’un homme. Les enseignants-religieux expriment une sollicitude de toute leur vie envers les jeunes ; les deux dimensions, religieuse et éducative, n’en font qu’une. C’est toute la vie d’un frère et c’est bien une œuvre d’amour. S’il n’est pas besoin d’être religieux pour être enseignant, les enseignants religieux sont au cœur des établissements comme le sel de la terre qui permet à l’établissement catholique de ne pas perdre de sa saveur.
Un enseignement catholique. Il ne faut pas confondre enseignement catholique et enseignement religieux, ni établissement catholique avec établissement réservé aux catholiques. Nous ferions fausse route. Par nature, un établissement catholique est ouvert à tous car catholique veut dire universel, il est ouvert à tous parce que le Christ s’adresse à tous les hommes et veut mener tout homme à son accomplissement. Aujourd’hui, des nombreux établissements catholiques reçoivent plus de non-baptisés que de baptisés. Pour autant, cet accueil universel n’est pas, et ne doit pas être, une banalisation ou une laïcisation de l’établissement. Un établissement est catholique parce que son personnel éducatif veut regarder les jeunes avec les yeux du Christ, les aimer avec le cœur du Christ, les faire grandir jusqu’à la plénitude de la stature du Christ. C’est le projet éducatif chrétien au cœur de la vie de l’établissement. Cela doit conduire à une manière particulière de pratiquer l’enseignement par des gestes et des attitudes inspirés du Christ. Pour que ces gestes et ces attitudes prennent tout leur force, une présentation du Christ et de l’Evangile doit être offerte à tous les élèves de l’établissement, soit par une culture chrétienne soit par le catéchisme selon les demandes des jeunes et des familles. Ainsi la manière implicite de vivre l’Evangile entre en résonnance avec l’annonce explicite du Christ pour que chacun devienne pleinement qui il est.
Contempler pour éduquer. L’éducation chrétienne s’enracine dans la contemplation du Christ. Tout d’abord, la conviction première est que chaque personne est créée à l’image de Dieu et appelée à laisser transparaître cette ressemblance divine. L’homme est inséparablement corps, âme et esprit et la formation doit honorer cette triple dimension. L’éducation à l’intériorité est alors inséparable de la formation intellectuelle et morale. Ensuite, il s’agit de reconnaître la dimension personnelle de l’homme pour s’éloigner d’un individualisme égoïste qui commanderait à la société comme d’une soumission servile au groupe qui nierait la dignité personnelle. Cela passe par la prise de conscience des dons des uns et des autres, la valorisation de la gratuité et la promotion de l’esprit de service. Ainsi les jeunes découvriront que le Père les aime inconditionnellement et qu’ils sont fils dans le Christ avec pour mission et vocation d’apporter au monde leur propre contribution en sachant recevoir la force et la joie de l’Esprit dans le quotidien de leur vie. Pour que cette mission d’humanisation ne fasse jamais défaut à ce monde et à l’Église, que cette Eucharistie où le Christ manifeste son don de Lui-même nous aide à vivre en disciples maintenant et dans les siècles des siècles.
Abbé Vincent Gallois +