Chers frères et sœurs,
Depuis des siècles, le tympan de la porte Miégeville, le plus ancien tympan historié et attesté de France, raconte l’Ascension du Christ aux pèlerins qui viennent à la basilique Saint-Sernin. Magnifiquement sculptée dans la pierre, la scène est d’une extraordinaire simplicité. Deux anges emportent notre Seigneur Jésus Christ vers le Ciel. Quatre autres acclament déjà son entrée triomphale dans la gloire du Père. Sous le linteau, les douze apôtres, la tête tournée vers le Ciel, une main levée en signe d’adieu, incrédules, contemplent la scène. Le regard attentif révélera une nette différence entre l’expression de joie sur le visage des anges et l’apparente perplexité sur celui des apôtres. « Pourquoi, Seigneur ? Pourquoi nous quittes-tu ? », devait probablement être la question qui tourmentait leur esprit.
Frères et sœurs, où en serions-nous aujourd’hui, où en serait le monde, si le Seigneur Jésus avait décidé de rester parmi ses disciples au lieu d’être enlevé au ciel ? Avouons-le, elle est étonnante cette grande fête de l’Ascension : faut-il vraiment se réjouir de ce que le Christ soit monté au Ciel dans son corps ? Y a-t-il vraiment un motif de joie dans ce qui est, malgré tout, un départ, la fin d’une certaine présence corporelle du ressuscité parmi les hommes ? Si nous nous laissons aller à rêver un peu, et à imaginer ce que serait l’Église si Jésus avait continué à se manifester à ses disciples, réunis pour la fraction du pain, nous pourrions penser que ce départ est plutôt une tragédie…. Que notre foi serait simple, nous disons-nous, si Jésus ressuscité se manifestait à nous lorsque nous nous réunissons pour prier et célébrer la messe ! Et alors que notre évangélisation serait ardente ! Et combien d’erreurs et d’errance de l’Église auraient pu être évitées si le Bon Pasteur avait continué à se révéler aux croyants et à leur enseigner les mystères du Royaume !
Aujourd’hui, Dieu nous parle d’amour, et il n’a pas peur de se répéter : entre la deuxième lecture et l’Évangile, les mots ‘amour’ ou ‘aimer’ reviennent 20 fois… Il semble que Jésus essaye de nous faire passer un message, et je me sens un peu obligé de vous parler d’amour. Mais ça n’est pas si simple que cela. Déjà parce qu’on ne le fera jamais aussi bien que Jésus qui a cette identité parfaite entre ce qu’il dit et ce qu’il fait, entre l’amour dont il parle et celui dont il vit, qui donne une espèce d’évidence à son propos. Et le prêtre qui passe après lui est bien embêté, contraint de dire la même chose que Jésus mais en moins bien, et en étant moins crédible.
« Demeurez en moi comme moi en vous », voilà la demande que nous adresse le Christ aujourd’hui. Est-ce un ordre ? un conseil ? Plutôt une supplication, je crois, presque une prière, en tout cas une requête amoureuse : d’ailleurs le verset qui suit immédiatement l’évangile d’aujourd’hui, mais que le découpage liturgique n’a pas cru bon de retenir, Jésus poursuit : « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour ».
Frères et sœurs,
Comment Jésus nous conduit-il ? C’est la question que nous pouvons nous poser en ce dimanche où nous le célébrons comme le Bon Pasteur, comme le vrai berger, selon ce qu’il vient de dire de lui-même dans l’Évangile. Sommes-nous donc des moutons pour avoir besoin d’un berger ? sommes-nous à ses yeux un troupeau de bétail pas très malin, qu’il lui faut conduire un peu malgré lui vers les montagnes, si besoin en envoyant des chiens de berger qui mordilleront les mollets des bêtes récalcitrantes ? Dans notre société où un sentiment exacerbé de la liberté individuelle laisse peu de place pour accepter une autorité quelconque, comment comprendre celle que le Christ revendique sur nous ? Et comment reconnaître l’autorité de l’Église et de ses pasteurs ?
Frères et sœurs,
Dans l’Évangile de Luc, Jésus ne perd pas trop de temps sur la terre après sa résurrection : dimanche matin il ressuscite, en fin d’après-midi il se promène avec les disciples vers Emmaüs, puis il attend que ceux-ci reviennent à Jérusalem et il apparaît à tout le monde d’un coup – c’est le texte que nous venons d’entendre. La suite est encore plus rapide : Jésus sort, les bénit et monte au Ciel. Les quarante jours qui séparent Pâque de l’Ascension sont résumés en un raccourci fulgurant et compressés en moins de 24h pendant lesquels Luc nous transmet l’essentiel de ce qui s’y déroule, en cherchant à nous transmettre, par ce raccourci, une vérité théologique et spirituelle. Il ne veut surtout pas que nous nous arrêtions là, que nous croyions que tout s’achève sur ce moment joyeux de la rencontre avec le ressuscité : il y a une suite, et Luc fait du teasing pour son volume II, qui s’ouvre immédiatement à la suite de l’Ascension : les Actes des Apôtres, que nous entendons pendant tout le temps Pascal, et dans lesquels nous voyons se réaliser la mission donnée par Jésus aux Apôtres. Et il y a comme une urgence de cette mission, que saint Luc veut nous faire ressentir avec ce raccourci chronologique : Jésus ne reste pas avec ses disciples pour prendre du bon temps, pour venir les consoler, pour un sympathique barbecue au bord du lac. Non, il revient pour attester de la vérité de la résurrection et pour les envoyer annoncer cette vérité au monde, et cette mission n’attend pas… La joie de la résurrection est réelle, mais il ne s’agit pas pour les Apôtres de se réjouir tranquillement chez eux autour d’un bon repas : cette joie ne demeure que lorsqu’elle est transmise, partagée.
Chers frères et sœurs,
Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité !
Je ne sais pas comment vous accueillez cette bonne nouvelle du matin de Pâques… C’est un refrain qui revient tous les ans, et nous courrons toujours le risque de trop nous y habituer. Pourtant chaque année, c’est une nouvelle, une bonne ‘nouvelle’, qui a toujours quelque chose de radicalement nouveau ! Et cette année particulièrement, nous pouvons nous réjouir sincèrement, profondément, de ce renouvellement que Dieu nous a promis et qu’il nous donne ! Pourquoi cette année particulièrement ? Le carême est toujours un temps d’épreuve, mais cette année nous avons été gâtés… Cette pandémie qui n’en finit pas, rythmée par les confinements qui fatiguent les corps et les âmes et exacerbent bien des tensions dans les foyers ; cette atmosphère de peur, d’insécurité, sanitaire mais aussi sociale, à la perspective des conséquences de l’arrêt de toute la société ; la prolifération des violences, des injustices qui abîment le tissu social et semblent rendre illusoire toute recherche du bien commun. Qui plus est, les scandales affectant la vie de l’Église, et dont il semble que nous ne sortons jamais, nous ont fait prendre conscience, douloureusement, que le trésor de l’Évangile est confié à des vases fragiles ; les péchés, les crimes, parfois la tiédeur de ceux qui devraient être au service du peuple de Dieu nous a blessé, et a meurtri notre confiance en l’Église, en sa capacité d’être vraiment le Corps du Christ où le Salut est annoncé et réalisé. A cela se sont peut-être ajoutées des épreuves personnelles : blessures familiales, difficultés professionnelle, soucis de santé… Peut-être avons-nous fait aussi, pendant ce carême, une expérience plus profonde de notre propre médiocrité, de notre difficulté à offrir de vrais efforts de conversion et de pénitence ; peut-être avons-nous compris que ces ténèbres s’enracinent aussi dans notre péché personnel, dans notre difficulté à être des saints alors que seule notre sainteté pourrait illuminer l’Église et le monde ?
Frères et sœurs, je ne sais pas si vous avez vu l’excellent film Diplomatie. André Dussollier y interprète le consul de Suède, intervenant auprès du gouverneur allemand de Paris, en 1945, pour tenter d’empêcher que les allemands ne détruisent entièrement la capitale dans leur défaite. Je sais qu’il peut exister une rivalité entre Toulouse et Paris, mais même un toulousain de mauvaise foi admettra que détruire Paris eût été une catastrophe, au moins sur le plan artistique. Bref, toujours est-il que le consul est dans le bureau du gouverneur, et essaye de lui faire renoncer à obéir aux ordres d’Hitler. Il remarque une gravure représentant le sacrifice d’Isaac, et dit à l’allemand : « Vous me faites penser à Abraham. Quand Dieu lui ordonne de tuer son fils, Abraham obéit. Il aiguise son couteau, construit un autel, lève son bras pour sacrifier Isaac, sans s’attendre à ce que Dieu intervienne au dernier moment. Comment peut-on justifier une chose pareille ? ». Le gouverneur répond : « En prétendant qu’il faisait la volonté de Dieu ou qu’il craignait sa colère ? ». Et le consul reprend : « Mais vous passez à côté de la vraie question, qui est : quel enfant voudrait d’un tel père ? ».
Frères et sœurs, dimanche dernier, Jésus s’éloignait, mais aujourd’hui, Jésus s’approche. Dimanche dernier, il s’écartait pour ne pas être saisi et approprié, pour ne pas être réduit à la mesure de nos désirs et de nos problèmes. Aujourd’hui, nous dit le texte de l’Évangile, Jésus est saisi, saisi de compassion. Dimanche dernier, il échappait à la foule qui le cherchait, mais aujourd’hui il étend la main et touche le lépreux qui est venu auprès de lui.
Pourtant, un lépreux, au temps de Jésus, il n’est pas quelqu’un qu’on a envie d’approcher. Et la description des gestes barrières imposés aux lépreux par les prescriptions du lévitique résonne particulièrement en ce temps de pandémie. Nous l’avons entendu, ils devaient se couvrir le visage, se tenir à distance, habiter à l’écart, ils devaient crier « impur ! impur ! » pour avertir les autres de ne pas s’approcher trop près, de respecter cette distanciation – qui était plus asociale que sociale. Après sa purification, il devait observer une demi-quatorzaine. Heureusement qu’on n’avait pas encore inventé le gel hydro-alcoolique, sinon le parallèle aurait été parfait. Vous l’aurez compris, la lèpre conduisait à un isolement, à une rupture des relations sociales dont nous mesurons aujourd’hui les conséquences dramatiques que cela peut provoquer chez l’homme. Considérée comme le châtiment divin, comme le signe du péché qui exclut de la communauté, la lèpre était l’impureté par excellence, ce dont il ne fallait surtout pas s’approcher de crainte de devenir à son tour impur. En plus donc de la maladie qui défigurait l’homme et faisait pourrir sa chair, en plus de l’isolement social qui le mettait au ban de la communauté, le lépreux était intouchable, indésirable, considéré comme frappé par Dieu à cause de ses péchés. Son impureté était une honte et une humiliation, ajoutant à l’isolement social une solitude morale et spirituelle.
« Vraiment, la vie de l’homme sur la terre est une corvée ». Ce texte du livre de Job est d’un réalisme décapant. Il pourrait presque être le journal de bord d’un étudiant qui subit un troisième confinement. Jour 1 : « Vraiment, la vie de l’homme sur la terre est une corvée ». Jour 12 : « depuis des mois je n’ai en partage que le néant ». Jour 35 : « Le soir n’en finit pas : je suis envahi de cauchemars jusqu’à l’aube ». Jour 123 : « ma vie n’est qu’un souffle, mes yeux ne verront plus le bonheur ». J’aime ce texte parce qu’il dit vrai, parce que devant l’épreuve de l’homme, il ne ment pas, parce qu’il ne prétend pas que tout est tout rose. La Parole de Dieu n’est pas là pour nous vendre du rêve, pour nous dire que tout est facile et que la foi vient régler tous nos problèmes. Elle est là pour nous dire la vérité, la vérité sur Dieu et sur l’homme, même quand cette vérité est dure, difficile à entendre et à admettre. Ce n’est pas un conte pour enfants. Et souvent elle jette une lumière crue sur les épreuves de notre vie, sans nier ou relativiser les souffrances que, comme tout homme, nous traversons ou traverserons dans notre existence.
« Frères, j’aimerais vous voir libres de tout souci. Celui qui n’est pas marié a le souci des affaires du Seigneur, il cherche comment plaire au Seigneur ».
Notre société n’est déjà pas tellement favorable au mariage : entre ses extensions récentes qui nient son ancrage naturel dans l’altérité sexuelle ouverte sur le don de la vie, la facilitation extrême du divorce, la promotion publique de l’infidélité, tout semble aller à l’encontre de la vision chrétienne du mariage. Et voilà que saint Paul en remet une couche : la semaine dernière, il incitait ceux qui ont une femme à vivre comme s’ils n’en avaient pas, et aujourd’hui il semble nous inviter à fuir à tout prix les soucis du mariage, comme s’ils étaient un empêchement à une vie avec Dieu et pour Dieu, à une sainteté authentique. Saint Paul nous souhaite-t-il tous célibataires et libres de tout souci ? Serait-il le premier promoteur de l’esprit de soixante-huit et du slogan « jouissons sans entraves » ? Saint Paul nous met en garde contre une telle interprétation de ses propos : « C’est dans votre intérêt que je dis cela ; ce n’est pas pour vous tendre un piège, mais pour vous proposer ce qui est bien, afin que vous soyez attachés au Seigneur sans partage ». Il veut nous proposer ce qui est bien, et pour cela, il identifie un risque qui, en réalité, concerne aussi bien les personnes mariées que les célibataires. S’il n’évoque pas ici le célibat c’est probablement pour des raisons contextuelles : dans la Corinthe du premier siècle, dans les cercles païens comme les milieux juifs, c’est le célibat qui est hautement déconsidéré. Sans doute l’Apôtre ne veut-il pas en rajouter au mépris ambiant du célibat (qui est d’ailleurs le sien), et il se consacre donc aux personnes mariées qui constituent d’ailleurs probablement l’immense majorité de son auditoire. Quel est ce bien qu’il veut leur proposer ? C’est d’être « attaché au Seigneur sans partage ». Le piège qu’il veut leur éviter, c’est que le souci des affaires du monde rogne sur l’attachement à Dieu, vienne le partager et amoindrir sa dimension totale, complète. Et saint Paul n’ignore pas que ce piège concerne aussi les célibataires, dont il fait partie : il ne suffit pas d’être célibataire pour être, du même coup, entièrement et totalement consacré à Dieu, pas plus d’ailleurs qu’il suffirait d’être marié pour en être détourné.
Chers frères et sœurs,
Nous lisons dans l’évangile : « Les mages virent l’enfant avec Marie, sa mère, et tombant à ses pieds il se prosternèrent devant lui ». Je ne sais pas vous, mais moi, je suis toujours étonné en écoutant ce passage et surtout en imaginant la scène : des nobles, à genoux devant un bébé et une femme, dans une étable, parmi les animaux, en sortant leur plus beaux cadeaux… Que penseriez-vous si vous étiez un témoin involontaire ? Surréaliste…
Le soir du 24 décembre l’an 0 la chorale des anges se rendait dans une petite ville de Judée, appelée Bethlehem. Installés confortablement dans des compartiments de NGV (Nuage-Grande-Vitesse), soulagés qu’aucun syndicat n’ait déposé de préavis grève ces jours-ci, les anges révisaient leurs partitions.
L’un d’eux ressortit ce nouveau chant intitulé « Gloire à Dieu au plus haut des Cieux » que l’ange Gabriel s’était acharné à leur faire répéter la veille. Les paroles l’interpelaient. Il ne résista pas à l’envie de faire partager sa perplexité :
Chers frères et sœurs,
Commençons par une petite histoire.
Jeune, j’ai joué du violon pendant huit ans. Les trois premières années j’y suis allé avec un grand plaisir. Les cinq autres c’était pour le plaisir… de mes parents. Alors je ne vais pas vous cacher que cela ne m’enthousiasmait guerre. En plus, aux cours habituels de solfège, de l’histoire de la musique et du violon, s’ajoutait l’obligation de jouer dans l’orchestre de l’école lors des concerts. Les répétitions étaient toujours très laborieuses. En tout cas pour moi. Paresseux, presque tout le temps je me faisais gronder. Pour éviter de me faire remonter en permanence les bretelles, j’avais trouvé une astuce imparable : en fait, il suffisait que je fasse semblant de jouer sans toucher les cordes. Et comme aucun son ne sortait de mon instrument, ni bonne ni fausse note, personne ne me disait rien. Au bout du compte, le chef d’orchestre s’en est aperçu et comprit que je ne servais à rien. Et vu ma mauvaise foi ainsi que mon manque de motivation, les profs ont baissé les bras et m’ont dispensé des concerts.
Je sais, ce n’est pas très amusant comme histoire, mais croyez moi, cela m’a servi de leçon pour des choses plus importantes.
« Je vous exhorte par la tendresse de Dieu, à lui présenter votre corps en sacrifice vivant, saint, capable de plaire à Dieu : c’est là, pour vous, la juste manière de lui rendre un culte, l’adoration véritable » Ce passage de St Paul nous invite au culte spirituel. Il rappelle que la vie chrétienne ne se réduit pas à des actes de piété ou des actes rituels mais qu’elle est une réponse de tout notre être à la miséricorde de Dieu, à la tendresse de Dieu.
« Heureux es-tu Simon ! » Il y a un bonheur de croire que lui atteste Jésus. Cela fait écho à la parole d’Elisabeth à la Vierge Marie « Heureuse celle qui a cru ! ». Celui que promet Jésus à « ceux croiront sans avoir vu ! » Ce bonheur de croire n’est pas une œuvre humaine (la chair et le sang) mais il est un don de Dieu. Pour cela, il nous faut prendre le chemin que Simon-Pierre a emprunté.
« Femme, grande est ta foi, que tout se passe pour toi comme tu le veux ! » Ce n’était pas gagné ! Jésus a peu à peu élargi son ministère des brebis perdues d’Israël à tous les peuples. Cela nous enseigne deux choses : sur Jésus et la conscience qu’Il a de sa mission et sur cette mission elle-même qui va de l’Orient à l’Occident ?
« Tu es bénie entre toutes les femmes. » La Vierge Marie tient une place essentielle dans le mystère chrétien. Ce n’est pas l’Église qui en ferait trop pour elle, c’est Dieu qui l’a établie comme instrument privilégié de son œuvre et comme exemple de vie chrétienne.
« Le murmure d’une brise légère. » Apprendre à reconnaître les signes de la présence de Dieu, cela aura été la tâche des prophètes jusqu’à la pleine révélation dans le Christ. Le prophète Elie se trouve à un tournant de cette progression. Quand Jésus marche sur les eaux, Il manifeste son autorité sur la force des éléments.
« Ceux qui avaient mangé étaient environ cinq mille, sans compter les femmes et les enfants. » Cette parole qui conclut le récit de la multiplication des pains nous dit ce que réalise l’Eucharistie. Elle fait d’une foule affamée un peuple ordonné. L’Eucharistie que nous célébrons n’est pas qu’une réunion religieuse propre aux Catholiques mais l’Instrument par lequel Dieu nourrit, purifie et transforme les rapports humains, par lequel Il établit son Peuple, Il constitue son Corps. C’est une histoire qui s’accomplit par des gestes et nous est racontée par des chiffres
Quelle est la fécondité de nos vies ? Comment peuvent-elles être féconde ? Cette question nous traverse les uns et les autres à un moment ou à un autre. Ce n’est pas un orgueil mal placé que de rechercher cette fécondité, au contraire cela répond au commandement du Créateur. Croissez et multipliez.
« Ne craignez pas ceux qui tuent le corps sans pouvoir tuer l’âme. » Cette parole du Christ peut éclairer l’épreuve que nous traversons. Le confinement fut décrété pour des motifs de santé publique, pour que justement les corps ne périssent pas. La relecture de ces événements doit être faite du point de vue spirituel.
« Souviens-toi de la longue marche que tu as faite dans le désert ; le Seigneur ton Dieu voulait t’éprouver et savoir ce que tu as dans le cœur… Il t’a fait passer par la pauvreté, il t’a fait sentir la faim, et il t’a donné à manger la manne. » Il est aisé de faire le parallèle avec la longue marche dans le désert du confinement et du dé-confinement progressif.
Quelle pauvreté avons-nous expérimentée ? Quelle faim avons-nous eu ? Et avons-nous reçu la manne qui nous était destinée ?
La fête de Pentecôte révèle l’Esprit. Au cours de leur rassemblement, l’Esprit se donne aux disciples, Il déploie sa puissance et leur fait parler un langage nouveau. Autant d’étapes qui dévoilent l’Esprit
Les Apôtres avec la Vierge Marie au cénacle figurent l’Église en prière. C’est une communauté et une communion. L’expérience du confinement et du dé-confinement progressif nous a fait sentir le mystère de l’Église, communauté et communion.
« Va, vis, deviens ! » Ce titre d’un film remarquable sur le devenir d’un jeune, que sa mère abandonne volontairement pour le sauver de la famine, pourrait être celui de cet appel d’Abraham. 3 verbes de mouvement pour dire que la foi fait bouger. La foi n’est pas statique. Il s’agit de se mettre en route avec le Seigneur. Elle est un risque à prendre, une route à parcourir, une identité à découvrir.
« Pour le fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : Vous n’en mangerez pas, vous n’y toucherez pas, sinon vous mourrez. » La tentation et le péché ont à voir avec la limite, la limite que nous avons à accepter de poser à notre volonté et à nos actes. Adam et Eve ont franchi la seule limite qu’ils avaient à respecter et ainsi le péché est entré dans le monde, et que par le péché est venue la mort. » Jésus nous montre l’art de connaître et de respecter cette limite et nous rétablit dans la paix de Dieu.
« Vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait. » Voilà l’ambition du Christ pour nous. Cette ambition, nous sommes invités à l’accepter et à l’accueillir. Comme toute la vie chrétienne, elle est un chemin à parcourir que le Christ nous indique.
Faire le bien « Vous êtes la lumière du monde. Voyant ce que vous faites de bien, les hommes rendront gloire à votre Père qui est aux cieux. » Cette affirmation de Jésus nous impressionne. Nous pourrions nous imaginer être déjà transformés par notre acte de foi alors que le travail de conversion est toujours devant nous. « Ce que vous faites de bien » renvoie à une exigence morale et spirituelle car pour faire le bien, il faut d’abord le voir et le dire.
« Ayez tous un même langage. » Au lendemain de la semaine de prière pour l’unité des Chrétiens, l’exhortation de St Paul demeure actuelle. Nous pourrions croire que l’unité est un combat récent, né des divisions qu’a connues l’Église au cours de son histoire. En fait, dès le début, (1 Co est de 55 ou 56), des courants ont marqué des différences et ont fait des divisions. St Paul nous indique, fort à propos en ce Dimanche de la Parole de Dieu institué par le Pape François, le chemin de l’unité : que résonne en nous la Parole du Christ.
« Tu ne voulais ni offrande ni sacrifice, tu as ouvert mes oreilles ; tu ne demandais ni holocauste ni victime, alors j’ai dit : « Voici, je viens. » Ces versets du Psaume 39 ont été lus comme prophétiques de la mission du Christ. Ils indiquent aussi le chemin qui est celui de tous les Chrétiens : la fin des sacrifices extérieurs, l’attention à l’appel de Dieu et l’accomplissement de sa volonté.
« Nous avons vu son étoile à l’orient. » Il y a des signes dans la vie qui peuvent changer une vie, ce signe-là a même changé le monde. Cette étoile a été perçue par les mages comme un signe qui annonçait le Roi d’Israël, cette étoile a révélé aux mages leur propre espérance d’un Sauveur. Aujourd’hui, Dieu envoie toujours des signes aux hommes. L’Église est donnée au monde comme l’étoile qui guide les hommes vers le Sauveur.
« Le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire. » Voilà l’audace du Christianisme. Dieu s’est rendu visible aux hommes. Certains refusent une pareille affirmation de la divinité de Jésus et en font le plus grand de tous les hommes, ou ne lui accorde qu’une qualité de prophète.
La foi chrétienne confesse invariablement : Jésus est Dieu, « Rayonnement de la gloire de Dieu, expression parfaite de son être. » Dès lors, il nous faut préciser de quel Dieu nous parle donc l’Enfant de la Crèche. Comment le dit-il ? Ici, le fond et la forme du message se tiennent.
A Noël, le plus beau cadeau, c’est Dieu Lui-même qui le fait. Il réserve à chacun de nous une grâce particulière. Elle pourrait passer inaperçue. Il nous appartient d’être attentifs à ce présent qui enrichit et transforme notre vie. Le 25 décembre 1886, l’histoire a retenu 3 grâces qui ont eu un très grand écho. La petite Thérèse Martin, future ste Thérèse de Lisieux, quitte la sensiblerie de l’enfance. Charles de Foucault est émerveillé de l’abaissement du Fils éternel. Paul Claudel, écrivain agnostique, devient subitement catholique. Ces 3 trois grâces nous indiquent ce que le Seigneur peut faire avec nous ce soir.
« Voici que la Vierge concevra et elle enfantera un fils. » La place de Marie dans le mystère du Salut est fondamentale. Elle n’est pas le signe d’une Église qui en ferait trop pour Marie mais bien la marque d’un Dieu qui, pour sauver les hommes, fait alliance avec eux. La place de Marie, c’est bien la place d’une création unique et d’une humanité prise au sérieux par le Seigneur.
Nous disons souvent que nous perdons notre temps ! Mais il y a plus grave que de perdre son temps, c’est de perdre le sens du temps, ne plus comprendre que le temps à prendre appartient à notre condition. Notre époque, à travers chacun de nous, est plus qu’une époque impatiente, une époque qui s’imagine dans l’instantané.
« Seigneur tout-puissant et miséricordieux, ne laisse pas le souci de nos tâches présentes entraver notre marche à la rencontre de ton Fils ; mais éveille en nous cette intelligence du cœur qui nous prépare à l’accueillir et nous fait entrer dans sa propre vie. » L’oraison d’ouverture prononcée par le prêtre au nom de l’assemblée nous aide à exprimer avec justesse notre prière.
L’Avent est une école d’espérance et nous avons besoin d’apprendre à espérer. Nous entendons aujourd’hui des propos désespérés qui passent pour une sagesse nouvelle voire même pour une remarquable générosité. « Pour sauver la planète, ne faisons plus d’enfants ! » Certains, pour diverses raisons, n’ont pas pu ou pas voulu avoir d’enfants mais là, des hommes, des femmes, des couples s’inscrivent dans une démarche qui met en balance la planète et la génération. C’est l’expression d’une désespérance terrible, une sorte de dépression sociale qui est un consentement ultime au désastre qu’il prétend combattre.
Voici que vient le jour du seigneur nous avertit Malachie dans la première lecture, en résonnance avec les paroles terribles de l’évangile. Ce jour du Seigneur qui ne laissera pas pierre sur pierres va éclore après des moments apocalyptiques. Serait-ce que ces belles pierres du temple que les artistes ont ouvragées de tout leur cœur disparaîtront ?
« De toutes les Nations, faites des disciples ! » Cette parole du Christ a une double portée que l’Église n’a eue de cesse de mettre en œuvre. Il s’agit bien sûr d’annoncer l’Evangile mais aussi de faire des hommes des disciples, des personnes en chemin et en capacité d’apprentissage toute leur vie. En raison de cette mission, l’Église a investit très tôt le champ de l’éducation. St JB de la Salle appartient à cette longue lignée d’éducateurs chrétiens qui se sont consacrés par amour de Dieu et des jeunes dans cette mission. En son temps, JB de La Sale a été novateur. Il a inventé l’école gratuite (200 ans avant Jules Ferry), ouverte aux pauvres, le regroupement des enfants par classe d’âge et un enseignement dans la langue maternelle. Ce Tricentenaire de la mort de JB de La Salle nous invite à porter un regard particulier sur l’enseignement et l’éducation.
« Seigneur, tu as pitié de tous les hommes, parce que tu peux tout. » Le Livre de la Sagesse unit puissance et miséricorde. L’Église confesse dans le crédo : « Je crois en Dieu, le Père tout-puissant » et l’exprime dans la liturgie comme cette oraison d’ouverture le formule : « Dieu de puissance et de miséricorde. » L’une ne tient pas sans l’autre, or nous ne les associons pas naturellement
« J’ai vu une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer. » Comme nous aimerions aujourd’hui être une Église avec des foules immenses ! Les foules exercent toujours une fascination, en même temps qu’une inquiétude. Elles semblent détenir la force comme la vérité. Le succès de masse appelle le succès (tel livre vendu à tant de millions d’exemplaires, tel film qui bat le record des entrées, tel musicien qui réunit des foules à ses concerts, pour un spectacle de rue) et semble porteur d’une ratification divine. Vox populi, vox Dei. Mais Jésus, Verbum Dei, n’a pas eu un tel succès !
Sauvés ou guéris. Tous les lépreux ont été purifiés mais c’est à un seul qu’il est dit : « Ta foi t’a sauvé ! » Il y a une grande différence entre les deux. Pour essayer de la saisir reprenons les étapes de la rencontre et recherchons ce qui a pu faire la différence.
« N’aie donc pas honte de rendre témoignage à notre Seigneur ! » En ce mois extraordinaire de la Mission, il est bon de nous interroger sur la Mission et de « ne pas avoir honte de rendre témoignage à notre Seigneur ». Car ce n’est pas nouveau, alors même que nous aimons le Seigneur, que nous le célébrons, que nous regrettons parfois de ne pas être assez nombreux à le faire, il y a, chez certains, hier comme aujourd’hui, une honte à rendre témoignage à notre Seigneur.
« Faites-vous des amis avec l’argent malhonnête » Jésus ne craint pas les formules paradoxales. Derrière cette parabole où il est fait l’éloge du gérant malhonnête, Jésus, à la suite de l’enseignement biblique, nous invite à remettre les choses dans l’ordre. L’argent est au service des hommes et non l’inverse.
« Pourquoi, Seigneur, ta colère s’enflammerait-elle contre ton peuple, que tu as fait sortir du pays d’Égypte par ta grande force et ta main puissante ? » Le dialogue entre Moïse et le Seigneur est des plus déconcertants. On a l’impression que c’est Moïse qui en connait plus que le Seigneur, qui a les idées plus larges et le cœur plus ouvert ! Comme si Moïse apprenait au Seigneur comment être un Dieu de miséricorde !
Lors de ce repas où le Christ a été invité et reçu, il regardait les gens choisissant les premières places. Notons qu’il ne nous est rien dit sur la place qu’a prise Jésus : lui a-t-on offert ce jour-là la place d’honneur ? S’il en est un qui a droit à la première place, n’est-pas Lui ? Ne convient-il pas aussi de lui donner la première place dans chacune de nos vies ? C’est cette première place que la liturgie Lui donne par la situation focale que l’Autel a dans nos églises. « Dieu, premier servi ! » a-t-on l’habitude de dire. En tout cas, pour parler d’humilité, Jésus saisit l’occasion de ce repas, il prend l’exemple d’une noce et il termine en parlant encore de festins ; voilà une manière de dire que l’humilité est un enjeu de relation et de joie.